Le 28 septembre 1443, le pape Eugène IV reprend possession de Rome après quelques années d'éloignement du siège pontifical, mais l'incurie des pouvoirs publics et les guerres intestines propres à cette époque avaient contribué à semer dans la ville un désordre comparable à celui des années avignonnaises. Dès lors, la volonté pontificale de reconstruire la Ville apparaît dans la littérature de l'époque en même temps que le dessein de la rétablir dans sa double autorité, terrestre et spirituelle. Dans ce contexte, les oeuvres de Flavio Biondo, secrétaire à la curie pontificale de 1435 à 1460, revêtent une importance cruciale puisqu'elles constituent un état des lieux détaillé et exhaustif ainsi qu'une restauration virtuelle, préalable nécessaire à la restauration matérielle que vont entreprendre les pontifes. Les titres des ouvrages de Flavio Biondo auxquels nous allons nous intéresser sont assez éloquents : Roma instaurata (1446), Rome restaurée dans sa topographie et sa splendeur antiques, et Roma triumphans (1459), Rome triomphante rétablie dans sa grandeur passée sur le plan institutionnel, politique, et religieux. Si instaurare implique, au sens premier, une restauration matérielle des monuments, qu'elle soit l'oeuvre des ouvriers ou de l'antiquaire, il faut également envisager l'instauratio au sens de refondation, de rétablissement de la Ville sur les fondements stables, en prélude à un nouvel essor, à une renaissance. La concomitance des deux projets se fait jour dans quelques passages des oeuvres de Biondo : quoique prépondérante, la restauration matérielle de la Ville n'exclut pas, elle introduit même sa refondation sur de nouvelles bases, non seulement matérielles, mais également institutionnelles et religieuses. Les deux textes s'achèvent sur