Développements instrumentaux en contexte de sous-détermination théorique. Cas du diagnostic moléculaire
Abstract
Les mécanismes de déclenchement du cancer restent trop peu connus pour permettre des stratégies opératoires pour le diagnostic et la détection précoces. L’utilisation expérimentale des instruments à haut débit dans un cadre revendiqué a-théorique (recherche de corrélations sans hypothèses) continue de susciter des espoirs, bien qu’elle permette rarement d’identifier des biomarqueurs moléculaires cliniquement pertinents. À l’heure du Big Data, elle génère la revendication que le développement technologique guiderait désormais la recherche biomédicale, rendant inutile toute tentative de théorisation ou modélisation a priori. Cet article conteste que ces stratégies instrumentales soient dépourvues d’arrière-plans théoriques. Il s’appuie sur l’existence de controverses et de surenchères technologiques pour mettre en évidence l’existence de représentations et de parti-pris sous-jacents. En l’absence de cadrage théorique contraignant, ces présupposés entretiennent une relation bilatérale avec les stratégies instrumentales : d’une part, la technologie peut modifier l’adhésion des chercheurs aux présupposés inhérents à certaines stratégies de recherche, tandis que, réciproquement, cette adhésion contribue à introduire des critères non épistémologiques dans l’évaluation des technologies.