Le Musée du Prado a récemment rejeté du catalogue de l’œuvre de Goya le Colosse, considéré depuis son entrée dans le Musée en 1931 comme une de ses peintures les plus emblématiques. Le déclassement du Colosse et son attribution à un obscur disciple de Goya, a déclenché un débat passionnel entre experts, et pose , une fois de plus , le problème de « l’authenticité » des peintures de Goya. En effet, avant le Colosse, d’autres œuvres célèbres attribuées à Goya ont été mises en question. Au-delà des critères subjectifs (« l’œil » de l’expert) ou objectifs (les investigations historiques ou techniques) défendus par les spécialistes pour déterminer les vrais et les faux Goya, c’est le concept même de Goya peintre qui est en jeu. Dans cette communication j'analyse ce Goya mythique que les historiens de l’art du XXIème siècle s’efforcent de défaire, et qui est une création littéraire du XIXème siècle, qui trouva dans les tableaux du Musée Espagnol du roi Louis-Philippe sa parfaite illustration visuelle. L’invention de Goya est née des inter(ré)férences entre les textes des écrivains français (critiques d’art, récits de voyage) et les onze peintures de Louis-Philippe attribuées à Goya. L’ensemble de ces œuvres – dont le choix et les thématiques obéissent à une construction conceptuelle et idéale du peintre - deviendra plus tard le socle sur lequel seront élaborées les définitions historiques de Goya.