Faire de l’histoire avec les “Vies”
Résumé
Le but de cette communication est de comprendre comment Jacques Le Brun fait de l’histoire avec les « Vies » de religieuses. En commençant au début des années 1980 à explorer ce fonds biographique pléthorique, Jacques Le Brun opte pour une approche historiographique originale, qui ne tient pas tant au contenu informationnel de ces biographies qu’à la façon dont ce matériau est capable de faire apparaître des « impensés » de l’historiographie du catholicisme français du XVIIe siècle. En écrivant au sujet des rêves, des maladies, des mortifications, de la « jouissance » et de l’« horreur », Jacques Le Brun donne à lire, dans les interstices de l’histoire des institutions, ce que ces vies comportent de désirs, de fantasmes, d’« excès » ou de souffrances, toutes choses dont a su par ailleurs se saisir le discours mystique au XVIIe siècle. On pourrait même se demander si Jacques Le Brun, en prenant en charge les « catégories les plus troubles et les plus fascinantes auxquelles recourent les hommes du XVIIe siècle » (« L’aveu », dans Sœur et Amante, p. 62) n’accomplit pas pour l’histoire ce que la mystique fait avec la théologie : faire émerger ce qui serait l’envers psychique et anthropologique de la Contre-Réforme.